«Le jardin Dumaine était alors incontournable»
Christoph Chabirand, 57 ans, enseignant retraité, est un natif de Luçon qui aura passé plus de temps à La Réunion qu’en Vendée. L’instit’-écrivain a été récompensé par le prix Hitchcock.
Entretien avec Christoph Chabirand, auteur de Datura et soleil noir et les gouttes d'eau.
Vous avez reçu le prix Hitchcock. Quelle valeur lui donnez-vous ?
Le trophée Hitchcock 2015 que j’ai reçu pour mon polar, DATURA ET SOLEIL NOIR, est important dans la mesure où cette forme de reconnaissance que sont les prix littéraires donne une visibilité accrue aux ouvrages primés, ce à quoi le lectorat est sensible. Ceci dit, j’écris par plaisir et pourrait reprendre à mon compte les paroles de Paul Léautaud à ce sujet. L’obtention d’un prix est la cerise sur le gâteau mais n’est en aucun cas présent à l’esprit dans le processus d’écriture ni un objectif.
Vous écrivez des polars où tout se passe à La Réunion. Le prochain aussi ?
La collection P.O.M. (Policier Outre-Mer) chez mon éditeur ORPHIE, implique que l’action se situe en Outre-mer, mais il y a de nombreuses références à la Vendée dans chacun de mes ouvrages. Le prochain est déjà écrit, mais pour le suivant, je pense faire voyager mes lieutenants créoles en Vendée et en particulier à Luçon ou dans les environs…
Parlez-nous de Luçon, vous qui y êtes né ?
Oui, je suis né à Luçon et y ai habité entre 10 et 18 ans. J’y ai donc vécu des moments forts, et en particulier cette période si intense qu’est l’adolescence : premières amours et amitiés durables, le jardin Dumaine était alors incontournable…
Et votre souvenir luçonnais le plus fort ?
Hormis les souvenirs déjà évoqués, j’ai été profondément choqué par la destruction du port. Enfants, c’était notre terrain de jeux, nous y cueillions des mûres et nous y pêchions les grenouilles. Je me souviens avoir vu des cartes postales anciennes où des trois-mâts étaient amarrés dans ce port. A mon sens, cette destruction représente à la fois une perte patrimoniale et économique majeure. Imaginons ce que pourrait être ce port aujourd’hui ! Rénové, empli de voiliers et toute l’activité induite …
Retraité de l’enseignement. C’est un milieu pour lequel vous pourriez être critique ?
Je n’aime pas ce mot de « retraité », je ne me sens nullement en retrait, mais j’ai effectivement cessé mes activités d’enseignant. Je peux être critique envers ce milieu, comme envers bien d’autres. C’est surtout en raison de ma nature, hostile à toute forme de dogmatisme et esprit de caste.
Vous reviendrez vivre en métropole ?
Ce n’est pas dans mes projets de revenir. Je ne renie ni ma terre natale ni mes origines, je me sens bien à La Réunion. Cette île qui m’a beaucoup donné et beaucoup appris. Je suis et reste un Vendéen qui vit à La Réunion, ici un « zoreil-péi », qui parle créole mais n’oublie pas le patois.
Toujours motard et toujours musicien ?
A Luçon, entre 10 et 18 ans, j’ai eu la chance de vivre, avec Henry, une histoire d’amitié qui m’a marqué à tout jamais. Nous partagions tout et en particulier la pratique de la musique et de la moto. Après la mort accidentelle en moto de cet ami, je suis resté fidèle à ces deux passions de jeunesse. C’est aussi une manière de ne pas l’oublier et de lui rendre hommage à chaque fois que j’embouche l’harmonica ou le trombone, ou que j’enfourche ma moto. Oui, je suis toujours motard et musicien.