Les contes d'Efinga

Un cyclone est annoncé sur l'île de La Réunion. Cinq musiciens de jazz se rendent malgré tout dans un luxueux hôtel de la côte ouest pour y donner un concert. Ils vont y rester bloqués toute la nuit avec une vingtaine de touristes, à attendre la fin de l'alerte rouge.

Pour tuer le temps et surtout évacuer l'angoisse causée par le cyclone baptisé Efinga ils vont, comme autrefois lors des veillées, raconter des histoires, vécues ou non, tendres, drôles, bizarres, nostalgiques ou sombres, ordinaires ou extraordinaires.

Ainsi sont nés les contes d'Efinga.

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Mais que fait la police?

Charlotte était atterrée. Elle, à soixante-dix ans passés, se retrouvait convoquée chez le juge. Elle qui avait toujours vécu en chrétienne assidue, il n'y avait d'ailleurs jamais eu de place dans sa vie pour un mari, messe tous les dimanches, confessions régulières bien qu'elles fussent sans objet, participation à toutes les actions caritatives organisées dans sa petite ville, y compris l'aide aux victimes du sida, alors que sa sexualité avait été à peu près inexistante, elle œuvrait même depuis peu, aux actions des "Restos du cœur" de Coluche, dont pourtant, elle n'avait jamais apprécié l'humour ni la vulgarité. Elle venait donc d'apprendre qu'elle était une délinquante.
"L'enfer est pavé de bonnes intentions!" avait-elle entendu sans relâche depuis que l'affaire avait éclaté dans les journaux.
Mais qu'avait-elle donc fait qui suscitait un tel brouhaha?
Décidément, elle n'avait pas eu de chance.
Un mois auparavant, le préfet en visite dans sa petite ville pour l'inauguration du nouvel hôtel de ville avait cru s'étouffer à l'arrière de sa Citroën officielle à cocarde, au spectacle qui s'était offert à ses yeux dans les rues de la tranquille bourgade.
Il avait vu de ses yeux, des mendiants déambuler dans les rues vêtus des chemises bleues très officielles des gardiens de la paix.
A tous les coins de rues il y avait des S.D.F. assis ou debout en uniformes républicains, certains faisaient la manche, d'autres buvaient à même le goulot des bouteilles de vin, se roulaient des cigarettes à base de mégots dépiautés. Tous étaient hirsutes et mal rasés, il y avait même des femmes qui portaient les chemises bleues comme des tuniques, par-dessus leur pantalons de jogging synthétiques.
Le préfet avait également remarqué que tous ces clochards avaient aussi les souliers réglementaires, vernis et noirs, de la police.